Il y a des épreuves dans la tempête de la vie qui nous font voler en éclats laissant notre corps et notre âme morcelés, brisés. A la suite d’un accident physique, d’une blessure, d’une opération, il n’est pas rare de ressentir son corps meurtri, comme désuni, fragmenté.
On peste alors contre ce corps en miettes, parfois planté de tubes, alité et dépendant.
A la douleur physique s’ajoute aussi la sensation de la perte de soi. On ne se reconnait pas. Quand le corps vole en éclats, il emporte l’âme avec lui et l’on peine à savoir qui l’on est.
Sylvain Tesson raconte comme, après sa chute, il était « bancal, le corps en miettes, avec le sang d’un autre dans les veines, le crâne enfoncé, le ventre paralysé, les poumons cicatrisés, la colonne clouée de vis et le visage difforme ».
Comment alors se rassembler pour réunir ces bouts de soi éparpillés ? Il y a plusieurs chemins possibles mais ils requièrent sans doute tous d’accepter qu’il n’y a pas de vie sans brisures, de voies bien droites toute tracées et qu’il est parfois vital d’emprunter les chemins de traverses.
Tesson est parti sur les chemins noirs à la recherche de « vallons où s’engouffrer le jour sans personne pour indiquer la direction à prendre. » Fracturée, amputée, Frida Kahlo a empoigné ses pinceaux avec pour seuls guides sa rage et sa passion, en dépit des injonctions de son époque.
Cela me fait dire que le chemin vers la résilience, celui qui nous évite les rancœurs jalouses et les frustrations haineuses, est celui d’une recherche insatiable de liberté dans les moindres brèches où elle peut se faufiler, que l’on soit en marche, à la recherche d’îlots de nature sauvage – pour tenter d’échapper à une modernité qui nous déplait – ou cloués dans une chambre en quête de sublimation et de couleurs toujours plus vives, quitte à choquer.
Après avoir été pulvérisés par des orages qui s’abattent brutalement sur notre légèreté, je nous souhaite de savoir déceler ces brins de liberté pour que notre être, même brisé ou en souffrance, puisse se rassembler et retrouver tout son éclat. Bon vent !
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