Il faut avoir de l’audace, aujourd’hui, pour s’atteler à réfléchir au commencement, à ce qu’est un début, à l’heure où l’on débat, souvent avec beaucoup de violence, de la fin de vie, où l’on parle euthanasie, aide à mourir, soins palliatifs; à l’heure où la guerre fait rage en Ukraine, où nos voisins combattent et meurent tous les jours pour éviter de sombrer dans le totalitarisme; à l’heure où, tous les matins en écoutant la radio, apeuré.e.s et impuissant.e.s, nous sommes confronté.e.s au déclin de la biodiversité, à notre planète asséchée, salement amochée.
C’est la question de la fin, de l’effondrement, de la décadence, de l’anéantissement qui semble être au coeur de notre actualité et de nos préoccupations. Les vibrations sombres et perfides du glas rythment notre quotidien.
Alors, oui, il faut de l’audace mais aussi beaucoup de ferveur et de malice pour s’accrocher à penser les débuts. Il faut sans doute être un.e habitué.e des pas de côté, des chemins de traverses pour choisir d’interroger le commencement là où la majorité des pensées et des discussions s’engouffrent dans la terreur de la fin. Aller à contre courant pour ouvrir une brèche lumineuse.
Penser le(s) début(s) ce n’est pas occulter le problème de la fin, bien au contraire, c’est refuser que la perspective d’une fin anéantisse tout espoir. Oser penser le commencement c’est entrevoir des possibles, quand on croit que tout est fini, pour s’autoriser à recommencer, c’est tenter de faire resurgir en soi l’intensité du sentiment de vivre malgré les épreuves, qu’on soit frappé de deuil, de maladie, d’exil : ” Ce moi qui émerge de la nuit s’y est brûlé, mais quelque chose comme une vie devient de nouveau possible. La nuit est dans doute encore en nous mais une résistance s’est éveillée à son contact et prend forme dans ce chaos.” (Claire Marin) L‘effondrement qui nous frappe de plein fouet peut révolter, nourrir une sombre colère, nous anéantir et nous plonger dans un profond désarroi. Oser penser les débuts c’est ré envisager sa trajectoire qui loin d’être bien tracée est faite, en réalité, de ponts rompus: “la puissance des véritables débuts tient dans cette interruption vécue pat le sujet au coeur même de son identité, touchant à son essentielle fragilité”. (C. Marin)
Penser le (re)commencement, en somme, c’est bâtir, en soi et hors de soi, des ilots de résistances optimistes et féconds, individuellement mais aussi collectivement, c’est oeuvrer à mettre en place des leviers d’action pour ne pas se laisser engloutir par la perspective d’une fin dramatique et, commencer à voir que dans toute fin qui se profile un renouveau. Merci Claire Marin.
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